Malgré son alias, Sonnyjim (fiston, gamin ou mon petit gars en VF) est loin d’être un bleu. En anglais, on parle même de veteran. Et pour cause, le garçon représente la crème de l’underground made in UK depuis plus de quinze piges. Natif de Birmingham, il a été l’un des meilleurs rappeurs de battles avant de fonder son label Eat Good Records et d’enchaîner les disques avec un rythme aussi mitraillette que le flow de ces débuts. Son style? Une certaine nonchalance alliée à un amour immodéré pour les prods léchées, jazz, soul et nineties. Sa métaphore favorite? La cuisine. Patron des Disques du Bien Manger, Sonnyjim n’a de cesse de répéter qu’il affectionne tout particulièrement les grands restaurants, comme une manière de sous-entendre qu’il propose du hip-hop cinq étoiles et fait main par opposition à ceux qui font du rap fast-food et industriel.
Sous forte influence US, le néo-Londonien assume totalement ne pas écouter de rap UK (la preuve ici) et préfère s’entourer d’Américains, à commencer par le Chicagoan Vic Spencer avec lequel il a fondé un duo magnifique sur les deux volumes de Spencer for Higher (le premier en 2018, le second en 2019). Pourtant pour The Chemistry Must Be Respected, il a choisi de faire équipe avec un compatriote de beatmaker, Illinformed. Ensemble, ils partagent une fascination pour Breaking Bad, la série qui semble avoir remplacé le Scarface de Brian De Palma dans l’imaginaire hip-hop. Comme le révèle l’interlude “Fring & White”, le titre du disque est d’ailleurs une punchline signée Walter White, l’anti-héros du show de Vince Gilligan: The Chemistry Must Be Respected. Une image qui, là encore, peut évoquer le champ lexical culinaire: il faut respecter la recette si on veut éviter le bad trip.
Et la recette du hip-hop des années 90, Sonnyjim et Illinformed la suivent à la lettre: des instrus magnifiques aussi soul que jazz, des boucles qui évoquent la library music à la française (Alain Goraguer en tête), des basses bien rondes comme des oranges bien nourries. Sans oublier de très belles trouvailles de samples comme le splendide “Too Soon You’re Old” de Penny Goodwin sur “Watchout!. Bref un travail musical qui fait qu’on pourrait tout à fait écouter la version instrumentale de The Chemistry Must Be Respected et qu’on y prendrait aussi beaucoup de plaisir. Mais comme l’alchimie entre ces textures méga aérées et la voix ultra terrienne de Sonnyjim fonctionne à merveille, ce serait perdre une partie de la magie de cet album addictif comme de la blue meth.
🇬🇧 The “Brummie” native has been one of the best battles rappers for years before founding his label “Eat Good Records” and producing records as fast as he is rapping! (…). His style? A certain “nonchalance” allied to an immoderate love for jazz and soul. (…) For “The Chemistry Must Be Respected”, he chose to team up with his fellow beatmaker, Illinformed, with whom he is sharing a fascination with “Breaking Bad”, the TV-show that seems to have replaced Brian De Palma’s Scarface in the hip-hop imagination – hence, the name of the album! (…) Sonnyjim and Illinformed are following the hip-hop recipe of the 90s to the letter: magnificent jazz and soul instrumentals , loops reminiscent of the French library music movement (Alain Goraguer in particular) and round basses sounds like well-fed oranges. Not to mention some great sampling like with the splendid “Too Soon You’re Old” by Penny Goodwin on “Watchout! (…) In short, the chemistry between these aerial textures and Sonnyjim’s earthy voice works wonderfully and is not to be missed!