24h avant sa (re)sortie, l’intense Live in Europe du saxophoniste de La Nouvelle-Orléans révèle l’une de ses plus belles pièces sur Le Grigri. Ardente, transcendante et libre, une musique qui n’a pas pris une ride, près d’une décennie après la disparition de son auteur.
Comme beaucoup de musiciens associés au “free jazz”, Noah Howard (1943 – 2010) ne se considérait pas vraiment comme un musicien de “free jazz”. Déjà parce que les musiciens détestent être mis dans des cases – les Anglo-Saxons ont d’ailleurs un joli verbe pour en parler: to pigeonhole, être rangé dans un casier ou littéralement, un trou à pigeon. Et puis parce que le “free jazz” a souvent été caricaturé en “types qui font n’importe quoi sur leurs instruments pour générer de la bouillie inaudible”. Ce qui est parfois vrai, mais très souvent faux. Dans la famille du free jazz, il y a des accents de gospel, des rappels au New Orleans, des échappées vers les musiques traditionnelles du monde entier, des souvenirs de bebop, des éruptions de blues ou encore des éclats de standards de Broadway.
Tout ça, c’est exactement tout ce qu’on retrouve chez Noah Howard en général et dans son Live in Europe réédité ces jours-ci par un tout nouveau label proche des Disques Bongo Joe, Sconsolato. Il faut dire que si ce natif de La Nouvelle-Orléans est moins célèbre que les Archie Shepp, Ornette Coleman et autres Albert Ayler, il n’en reste pas moins l’un des piliers essentiels de ce jazz avant-gardiste des années 70, un jazz qui préférait (se) chercher plutôt que de (re)trouver des formules déjà toutes faites. Un type tout autant électron libre que rassembleur de communauté puisqu’il a fondé la New York Musicians Organisation (définie comme «groupe d’action culturelle et politique»), créé son propre label AltSax ou dirigé un club de jazz dans les années 80 à Bruxelles.
Sorti en 1975 comme un concentré de sa tournée européenne avec Takashi Kako au piano, Kent Carter à la contrebasse et, alternativement, Muhammad Ali et Oliver Johnson à la batterie, ce Live in Europe vol.1 ne sera jamais suivi d’un volume 2. Dommage car il dégage une chaleur, une spiritualité et une liberté qui déglinguent tous les clichés sur le free jazz. Une musique habitée qui s’inscrit clairement dans les pas du spiritual jazz écorché à la Coltrane dont Noah Howard reprend le célèbre “Olé” dans une version épique de douze minutes.
24h avant sa (re)sortie tirage limité à 300 copies vinyle, Le Grigri vous propose de goûter en avant-première l’un des plus beaux morceaux de ce disque rare. Seule composition signée 100% Noah Howard, ce “New Arrival” tout en suspension, tout en suggestion et tout en ascension est typiquement le genre de B.O. qui peut accompagner les aubes tout comme les crépuscules.