Le Lion est mort le 24 mars 2020, à 86 ans, des suites de cette raclure de virus. Saxophoniste généreux, touche-à-tout de génie, personnalité charismatique, le Franco-Camerounais va diablement nous manquer. On lui rend hommage avec quelques mots et beaucoup de sons.
Tout le monde ce matin se souvient de son rire gargantuesque. Dès ses débuts, le Franco-Camerounais avait décidé d’abriter sa musique sous cette belle humeur. Le premier titre de son premier album Saxy-Party en 1969? “Oh! Happy Day”. Tout simplement. Ça nous fait donc tout bizarre de voir Manu Dibango nous rendre pour la toute première fois de sa vie triste. D’autant plus triste qu’il s’est éteint à cause de cette saleté de virus qui nous confine la vie depuis des semaines. D’autant plus triste que ça rappelle tous ces jeunes imbéciles qu’on voyait dans les journaux répéter que le Covid-19, ce n’était pas grave car ça ne touchait que les “vieux”, oubliant par là même que les “vieux” ce sont nos grands-parents, nos parents, nos voisins, nos anciens et/ou nos modèles. Et que les “vieux” ce sont de la chair, des souvenirs et des sentiments.
De la chair, des souvenirs et des sentiments, il y en a eu dans la carrière monumentale de celui qu’on a appelé Papa Groove avant que le temps et les années ne le débaptisent en Papy Groove. Des anecdotes et des (hauts) faits sur Manu Dibango, vous allez en lire partout, on ne va donc pas faire redondance. Au Grigri, on se rappelle juste à quel point ses morceaux ont toujours fait sensation dans nos DJ-Sets. Il y en a même un, “Soul Fiesta” tiré de l’album Africadelic, qui a parfois rendu complètement fous des danseurs déjà bien échauffés.
Car Manu Dibango représentait totalement l’esprit du Grigri. Profondément curieux et éclectique, le Monsieur a été l’un des pionniers de l’afro-jazz, tout en magnifiant le funk, l’afrobeat, les rythmes latins ou même le reggae. Et sa musique était autant une invitation à la danse pleine qu’à la pensée dense – il fut même nommé “Artiste de l’UNESCO pour la paix”. Il était devenu plus qu’un artiste: une véritable figure, un personnage populaire, un monstre sacré dont on oubliait presque le talent protéiforme. Quand on était jeunes, c’était comme Gainsbourg: un sympathique personnage de télé. C’est en grandissant et fouillant dans les bacs à vinyles qu’on s’est rendu compte à quel point il avait composé d’incroyables morceaux au groove entêtant et à quel point il avait été copié et mimé par des générations de musiciens.
C’est à ce Manu Dibango que l’on rend hommage sur Le Grigri. Une heure en compagnie de quelques-uns des titres qui nous ont fait comprendre qu’avant d’être Papa Groove puis Papy Groove, il fut vraiment le Prince of Groove.
Tracklist
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The Soukouss part. 1 (feat. Hal Singer) from The Soukouss, 1971
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Jingo (feat. King Sunny Ade) from Wakafrika, 1994
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Waka Juju from Waka Juju, 1982
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African Carnaval from Africadelic, 1972
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Senga from Manu Dibango, 1973
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Hibiscus from Soul Makossa, 1972
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Miniya from Mboa, 1983
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Besoka from Manu 76, 1976
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Ceddo from Bande Originale Du Film Ceddo, 1977
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Dakar Streets from Afrovision, 1976
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Walking to Waza from African Voodoo, 1972
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Lakisane from Makossa Man, 1973
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Wild Man In The City from O Boso, 1972