Chaque jour de nouveaux titres entrent dans la programmation du Grigri. Et pour cette fin d’année, on voit les choses en grand en vous présentant une pièce de plus de dix minutes conçue par un saxophoniste hors format(s). Antoine Desnoyers vous explique pourquoi cette « Fiction » l’a renversé.
Lionel Martin, c’est cet instrumentiste aux influences hirsutes, puisant à la source jazz d’une fanfare Nouvelle-Orléans comme dans la citerne d’essence en feu d’un dépôt de conteneurs de Ann Arbor (Michigan), berceau du punk ricain des Stooges ou encore plus tard de la techno industrielle de la ville voisine, Detroit. Il est cet arpenteur musical tous azimuts s’étant constitué une palette sonore très personnelle au fil de rencontres, des aléas et vicissitudes de sa pratique ouverte. Résultat, il s’est façonné avec le temps ses propres standards, son propre flow que ce soit avec Ukandanz ou le batteur Sangoma Everett.
Mais le Français est aussi un collectionneur invétéré de vinyles comme en témoigne le décor de son récent projet solidaire et intempestif, le Solo Insolent. Le pitch ? Une captation mensuelle, faite sous la lueur bleutée du néon de son grenier-laboratoire, à laquelle ont participé les talentueux Fred Escoffier, Nicolas Guay, Louis Sclavis, Nguyên Lê, Philippe Pipon Garcia (a.k.a. KPT’N PLANET), et tout dernièrement Zhao Li’ang.
L’audace de ce chant libre, bourdonnant et virevoltant dans l’implacable mécanique ferroviaire souterraine au tempo métronomique
Intitulé Solos, son nouvel opus vient de sortir sur son label Ouch ! Le multi-saxophoniste nous y livre cinq titres qui lui ressemblent en bon amateur de sonorités irradiantes qu’il est. Le titrage des pistes ressemble au chapitrage d’un recueil poétique crépusculaire. S’il pourrait sembler bien sombre de prime abord, il sonne en réalité comme une ode à la résistance, aux libertés que l’on s’octroie tant bien que mal, dans la force ou plus vraisemblablement dans l’insouciance. Composé avec le bricoleur et capteur de son Bertrand Larrieu, l’album vaut aussi le déplacement pour sa splendide cover signée par le peintre Robert Combas.
Et s’il est une track qui a retenu notre attention, c’est une piste fleuve de près de treize minutes : Fiction. Comme un cri coincé entre les rails au tréfonds d’une rame de la ligne 2 du trom’ où le flot du saxophone se fraye un chemin dans les couloirs des transports si communs, de l’histoire sans cesse recommencée d’un trajet dont personne n’est le héros. Hagard, seule nous sort de la torpeur l’audace de ce chant libre, bourdonnant et virevoltant dans l’implacable mécanique ferroviaire souterraine au tempo métronomique, austère, pour enfin retrouver de l’oxygène et la lumière du jour à l’arrêt Stalingrad.
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C’est d’abord une rencontre entre quatre musiciens de trois pays différents (Mali, Gambie et Italie) avec l’envie de proposer une musique aux racines africaines bien ancrées mais en même temps ouverte à de nouvelles directions. Ici kora, djeli ngoni, chants de griot se mêlent à des influences jazz, musiques improvisées et même folk. Cette union entre tradition et moderne nous ouvre de nouvelles possibilités dans un genre qu’on croyait figé. Et pour ça grand respect à Lolo.
Né à New York, vivant à Toronto, ayant des racines japonaises, le chanteur Kingo Halla est un touche-à-tout s’inspirant à la fois du jazz brésilien, de la soul, ou du R’n’B. Avec son dernier projet, il réussit un véritable tour de force en mélangeant habilement influences old-school et production moderne. Être fidèle à la soul d’origine sans jamais sonner dépassé. Si on ajoute avec ça un songwriting talentueux porté par une superbe voix, on se demande si Kingo Halla n’a pas trouvé la formule sécrète pour une soul des années 2020’s.
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